Vous avez subi un événement (accident de la route, agression, accidents de la vie, accident médical) qui vous a causé des dommages corporels ?
Vous vous trouvez probablement au début ou au milieu d’un parcours du combattant. Celui nécessaire pour obtenir la juste indemnisation de ce préjudice corporel. Il comporte nécessairement des expertises médicales. On vous a sans doute conseillé de faire appel à un médecin expert de recours.
Autrement dit un médecin qui « est de votre côté ».
Mais comment devez-vous le choisir ? Et de qui s’agit-il précisément ?
Dans quelle situation vous trouvez-vous exactement ?
La notion d’expertise médicale est intimement liée à l’expertise du médecin, au fait qu’il ait étudié la matière et qu’il sache donc vous ausculter. Cependant, un médecin n’est appelé « médecin expert » que s’il a été nommé par un tribunal. Et donc s’il figure sur une liste spécifique de médecins habilités à être désignés par les tribunaux lorsqu’ils ordonnent une « expertise judiciaire ».
Lorsque vous avez besoin de faire appel à un médecin de recours, vous n’en êtes pas forcément déjà à ce stade assez conflictuel où un tribunal est saisi.
Vous êtes peut-être tout simplement dans la situation où la compagnie d’assurance du responsable de l’accident, ou votre propre assureur, veut vous faire rencontrer son médecin conseil.
Le médecin conseil représentera la compagnie d’assurance, alors que le médecin de recours vous assistera à cette expertise. L’objectif de cette réunion avec ces professionnels étant de produire un rapport d’expertise qui servira de base de travail pour le calcul de l’indemnisation de vos préjudices corporels.
Que devez-vous comprendre dans une telle situation ?
Pourquoi tant de monde ? La médecine n’est-elle donc pas une science objective qui ne nécessiterait l’intervention que d’un seul médecin ? N’y a-t-il donc pas des barèmes qui permettent d’établir les indemnisations de façon rationnelle et objective en fonction de telle ou telle incapacité ou de telle ou telle séquelle ?
Eh bien justement pas.
Contrairement à ce que l’on croit trop souvent, il n’y a pas de système de référence objectif pour l’évaluation d’un dommage corporel. Bien sûr, il existe une nomenclature listant les préjudices à évaluer, mais ce n’est qu’une aide à la décision, et non une grille précise qui permet de trancher définitivement et objectivement. En revanche, les médecins procéderont à une évaluation précise de telle ou telle incapacité en termes chiffrés (10%, 15% , 30%, etc.) sur la base d’un barème qui leur sert d’outil, celui du Concours Médical.
Tout le monde a donc intérêt, dans une telle situation, à ce que les spécialistes, médecins conseils et médecins de recours, discutent entre eux, de façon amiable.
Cela ne signifie pas qu’ils doivent être d’accord. Cela signifie que votre cas mérite d’être étudié de façon approfondie.
Quel est l’objectif ?
À ce stade, on se trouve probablement avant consolidation (c’est-à-dire dans les mois ou semaines avant que votre état de victime soit considéré comme n’étant plus évolutif). L’objectif des compagnies d’assurance est donc alors d’estimer de façon la plus précise possible combien vos préjudices risquent de leur coûter (l’évaluation définitive ne pouvant se faire qu’après consolidation).
Cela leur permet de provisionner les sommes qu’elles devront verser à la victime, c’est-à-dire de préparer leurs finances au versement de ces sommes ultérieurement. Pas encore de les verser en totalité. Il s’agit d’un principe de gestion.
Pour les victimes, un rapport d’expertise concluant à l’absence de consolidation de l’état de santé permet de justifier un peu mieux les préjudices afin de prétendre au versement d’avances supplémentaires.
Quel est le piège ?
Toujours à ce stade, le risque pour vous, si vous n’êtes pas assisté(e), est que le médecin-conseil de l’assureur chargé de vous examiner, en ne vous écoutant pas suffisamment, fige sa position ou son évaluation pour l’avenir. Il ne reviendra pas sur son évaluation ultérieurement, même si elle est minimisée, et même si vous revenez lors de la prochaine expertise assisté(e) par un médecin-conseil de recours. Un phénomène très humain qui, hélas, aura des conséquences pour vous (il sera très difficile de faire valoir vos droits a posteriori).
La difficulté est la même si vous vous présentez à l’expertise accompagné(e) par un médecin-conseil mandaté par votre propre assureur pour vous assister. Les médecins travaillent régulièrement pour les compagnies d’assurances et en connaissent bien les arcanes et les logiques internes.
Cette situation ne devrait pas se produire. Par souci d’indépendance, il est toujours préférable que le médecin-conseil qui vous assiste ne travaille pas pour les assureurs, mais uniquement pour les victimes.
Cela se produira pourtant parfois s’il est nommé par elles dans le cadre de la clause « protection juridique » de votre assurance responsabilité civile. Laquelle prévoit, s’il vous arrive quelque chose, de vous accompagner dans les procédures.
Paradoxe
Et ainsi, votre compagnie d’assurance, pour mieux vous « défendre » face à la compagnie d’assurance du responsable de l’accident, vous enverra un médecin-conseil qui, peut-être, travaillera le lendemain en sens inverse, pour une autre compagnie d’assurance ayant intérêt à minimiser l’évaluation.
Dans ce cas-là, la force des habitudes vous sera préjudiciable, alors même que ce médecin est sensé vous écouter au mieux.
Bref. Si vous faites fonctionner la clause « protection juridique », vous ne pouvez être sûr(e) de rien, et en aucun cas du bon déroulement de l’expertise médicale.
Et même si vous devez vous attendre à ce qu’il y en ait d’autres, la première expertise médicale est importante. C’est là que les médecins vont se forger une première opinion sur quantité de points. Opinion sur laquelle, ensuite, il leur sera difficile de revenir.
Concrètement, comment se passent les consultations d’expertise médicale ?
Quand il y a plusieurs domaines médicaux à évaluer, on organise plusieurs réunions, avec différents experts. La victime entre dans le cabinet médical et reçoit un examen approfondi. Le médecin expert va évaluer par exemple les flexions, les rotations, les angles que peuvent former les membres, les articulations, les bras, la tête, les cicatrices, etc. La victime sort ensuite du cabinet et c’est à son avocat des dommages corporels d’y entrer. Il écoute l’expert décrire ce qu’il a constaté au niveau médical, avant de participer à la discussion sur l’évaluation du préjudice à venir.
En cela, la présence d’un avocat est essentielle, à chaque consultation.
Quelle serait la situation idéale ?
La situation qui sera pour vous la plus favorable sera celle où les médecins auront fait des évaluations les plus favorables pour vous, le plus tôt possible, et où vous n’aurez pas à vous battre ensuite à déposer des demandes pour les faire changer d’avis.
Pour obtenir ces « conditions idéales » le plus tôt possible donc, mieux vaut ne pas faire fonctionner cette « clause protection juridique » et venir avec un médecin de recours que vous aurez choisi vous-même et en vous adjoignant les services de votre avocat.
Vous pourrez compter sur ce dernier pour qu’il fasse en sorte que soient posées les bonnes questions, celles dont il sait qu’elles auront des incidences importantes sur l’indemnisation. Sa mission est de faire traiter et analyser de façon objective les divers aspects de chaque préjudice. Il fera en sorte que soient évités les biais d’évaluation classiques liés aux émotions de la victime.
Celle-ci a souvent tendance, en effet, à vouloir cacher certaines faiblesses de sa situation, à dire que « ça va aller ». C’est humain. Mais voilà, si cela fige l’opinion d’un médecin-conseil, si cela l’amène à sous-estimer vos difficultés de la vie quotidienne, par exemple, ce sera pour vous l’amorçage d’une situation d’injustice qu’il sera ensuite long et difficile de corriger.
Que se passe-t-il dans le cas où il n’y a qu’une seule compagnie d’assurance ?
Dans le cadre d’un accident de la voie publique, l’assureur de la victime est mandaté, en premier, pour gérer le dossier et évaluer les préjudices. Toutefois, les accords entre les assureurs prévoient qu’au-delà d’un certain seuil de gravité (5% de séquelles), l’assureur du tiers responsable reprend la gestion du dossier.
Dans cette situation, même si c’est votre assureur qui gère le dossier, les assureurs conservent les mêmes réflexes et n’ont pas d’intérêt particulier à évaluer vos préjudices au plus haut.
Là encore, votre réflexe doit être le même. Même si vous avez le sentiment que le médecin-conseil de votre assureur est bienveillant, même si on insiste sur la gratuité de l’expertise, déplacez-vous avec votre médecin de recours…. et votre avocat.
Cela ne sera pas plus cher. Les honoraires du médecin de recours vous seront remboursés dans le cadre de l’indemnisation. Par ailleurs, un avocat tel que l’auteur de ces lignes, non seulement est rémunéré sur les résultats obtenus, mais en outre, peut, dans certains cas, avancer les honoraires du médecin de recours.
Il n’est jamais trop tôt pour faire intervenir un avocat dans le processus. Il n’est jamais trop tôt pour vous faire entendre et faire en sorte que tout ce qui fait l’unicité de votre situation soit pris en considération.
Vous êtes déjà un peu plus loin dans votre parcours du combattant ?
Les situations évoquées ci-dessus sont déjà loin derrière vous ? Vous avez déjà vécu des expertises médicales ? Elles ne vous ont pas été favorables ?
La logique reste la même. Un médecin de recours sera indispensable. Et un avocat bien utile, là encore. D’autant plus utile que vous vous trouvez dans une situation qui se rapproche d’une ambiance beaucoup plus conflictuelle.
Il s’agira alors de faire sentir que vous êtes prêt(e) à aller plus loin.
Prêt(e), par exemple, à demander au tribunal d’ordonner une expertise judiciaire. Celle-ci serait effectuée par des médecins experts nommés par le tribunal (ils devront respecter un principe dit « contradictoire », principe qui exige que votre point de vue soit entendu point par point). Mieux vaudrait (pour l’assureur) envisager une nouvelle expertise amiable où serait présent cette fois un médecin de recours.
Mais pour obtenir ceci, il faut pouvoir menacer d’ester en justice et de saisir le tribunal de grande instance, ce que seul un avocat peut faire.
Conclusion : le plus tôt sera le mieux pour le médecin de recours
N’attendez pas. Dès que l’on vous invite aux premières expertises médicales, préparez-vous. Ne vous y rendez pas seul(e). Ne vous fiez pas aux sirènes des garanties et clauses de protection juridique de votre assureur ni à celles de la gratuité.
Faites appel à un avocat spécialiste, qui mandatera pour vous un médecin de recours.
Cela fera gagner du temps à tout le monde, sachant que les honoraires du médecin-conseil de recours vous seront remboursés par l’assureur.
Et cela vous permettra d’être indemnisé(e) de façon juste, dans la mesure où, même dans le cadre d’une procédure amiable, vous ne vous serez jamais trouvé(e) en position de faiblesse. Tout au long du chemin, vous aurez vraiment fait en sorte que ce médecin là soit vraiment pour vous un vrai recours.
Une réponse
La protection juridique est très sérieuse aussi car quand il y a radios et consolidation les preuves sonts la pour indemniser Faut simplement être intelligent et ne pas se laisser faire