Hadrien Muller, avocat préjudice

Avocat spécialisé en préjudice corporel

Diplômé en évaluation des traumatismes crâniens

Nomenclature Dintilhac : la bonne façon de s’en servir pour une victime

Table des matières

Sur Internet, il est assez facile de rencontrer la Nomenclature Dintilhac, la fameuse liste qui vous permet (du moins dirait-on) de reconnaître votre propre cas et de préparer votre dossier d’indemnisation pour la compagnie d’assurances. En parcourant la liste, vous pouvez avoir la sensation d’identifier vous-même les préjudices dont vous souffrez… et les euros qu’ils valent.

Victime d’accident de la route, accident de la vie courante ou autre accident corporel, vous savez qu’après votre expertise médicale arrivera la phase de liquidation des préjudices. Autrement dit, une fois que le médecin expert aura listé vos dommages subis, il les glissera dans les bonnes cases en tant que préjudices, pour pouvoir les chiffrer.

Mais avant même de parler de barème de vos souffrances, il est important de les nommer. Vous pensez – et c’est bien normal – être le ou la mieux placé.e pour définir vos préjudices, surtout avec cette liste à l’appui. Qui mieux que vous peut dire ce dont vous souffrez ?

Vous seriez surpris.e de réaliser que cette liste est en réalité un piège pour vous… À moins que vous ne soyez déjà expert.e en droit et en jurisprudence !

À qui s’adresse vraiment la Nomenclature Dintilhac

C’est une liste pour les spécialistes. Elle concerne le médecin-expert de l’assurance, l’avocat et son médecin-conseil, l’assureur et les magistrats pour les dossiers qui arrivent aux tribunaux.

Certes, elle parle de vous, et ses cases sont prévues pour évaluer votre état depuis l’accident et jusqu’à votre consolidation médicale. Mais elle ne s’adresse pas à vous, la victime.

C’est pourquoi elle est écrite en jargon technique. Préjudice d’agrément, déficit fonctionnel, préjudice moral, incapacité permanente, préjudice patrimonial ou extra-patrimonial, perte de revenus ou pertes de gains professionnels… Les définitions ne sont pas difficiles à trouver sur Internet, et vous pourrez peut-être en déchiffrer le vocabulaire. En revanche, ce que vous ne pourrez sans doute pas faire, c’est prévoir avec justesse quel préjudice s’applique à votre propre situation et à quel degré. Et ceci pour une raison simple : il s’agit d’un document indicatif, générique, mais votre cas est unique.

« Ce poste de préjudice est pour moi »

Toutefois, nombre de victimes directes (ou victimes indirectes et proches de la victime) souhaitant s’informer vont détailler ce rapport Dintilhac et essayer de le faire correspondre à leur cas.

Prenons un poste de préjudice en apparence évident à comprendre : le préjudice d’établissement. Soit ce poste qui considère qu’à cause de son accident, la victime ne sera plus en capacité de fonder une famille.  

Une victime d’accident corporel qui souffre de séquelles comme la dépression (même légère), une modification radicale de son apparence physique (cicatrices, handicap lourd avec fauteuil roulant par exemple), d’isolement social, etc., pourrait naturellement imaginer qu’elle aura le droit à être indemnisée au titre du préjudice d’établissement. Il sera très difficile (voire impossible) pour cette personne de rencontrer quelqu’un dans ces conditions, et encore moins d’établir un projet de vie familiale.

Or, raisonner comme cela est une erreur. Cet état a toutes les chances d’être passager (et il l’est, heureusement, dans de très nombreux cas), et l’impossibilité de fonder une famille doit être caractérisée, notamment par une impossibilité à procéder ou à nouer des relations. La victime risque donc de vouloir insister sur ce chef de préjudice pour obtenir des indemnités à ce titre… Et passer totalement à côté de la réalité de son cas, donc de sa juste indemnisation.

Dans les faits, les seuls postes de préjudices qui soient communs avec certitude à tous les cas de victimes d’accidents sont les souffrances (même évaluées au plus faiblement à 0,5/7) et les gênes temporaires dont souffre toute victime avant consolidation.  

À chaque cas sa hiérarchie de préjudices

Le reste des postes de préjudices de cette nomenclature sera utile à différents degrés selon la gravité du cas.

Dans les cas les plus graves, tous les postes devraient être examinés dans le détail mais, ceux sur lesquels pourrait insister votre avocat sont l’incidence professionnelle et le besoin en aide d’une tierce personne.

Dans les cas moyennement graves, il s’agira d’inclure le plus de préjudices possibles vous concernant dans le dossier pour obtenir des indemnités satisfaisantes.

La bonne stratégie pour bien utiliser la Nomenclature Dintilhac

Au final, chaque victime doit accepter d’office qu’elle ne remplira pas nécessairement tous les postes de préjudice. Ce qui compte, c’est la stratégie qu’elle appliquera pour faire valoir les préjudices « utiles ».

Donnons un exemple : une victime dont les souffrances ont été évaluées à 4/7, et qui voudrait qu’on les reconnaisse à ce qu’elle estime la juste valeur : 4,5/7. Cela lui permettrait de réclamer quelques euros de plus à la compagnie d’assurances… Mais lui ferait potentiellement perdre une énorme partie de son indemnisation, si elle concentre ses efforts sur ce point, plutôt que sur un autre.

C’est la même chose qu’une victime qui voudrait insister sur son arrêt de travail, obtenir absolument une réparation pour l’altération de ses conditions de travail, faire rembourser les frais de transport de ses enfants qui ont dû venir à l’hôpital, ou autre. En s’obstinant sur un point précis, on oublie parfois l’essentiel. 

Ce qui va vraiment compter, lorsque la grille a été remplie par le médecin des assurances, c’est la défense – avec un avocat spécialisé dans le dommage corporel, de préférence – des postes-clés. Soit accepter de renoncer à certains points pour souligner ceux qui ont un poids réel dans le cas précis de la victime.

Le cas par cas

Il faut donc savoir exactement sur quels points insister selon le cas particulier de la victime.

Prenons une victime consolidée d’un accident de moto. Son taux de séquelles est évalué à 9% (relativement faible) et réparti sur plusieurs endroits : une légère anxiété qui lui vaut X% de séquelles, une gêne permanente au poignet et un très léger tremblement, par exemple.

Or, cette personne exerçait le métier de chirurgien. Avec son poignet bloqué et son tremblement, impossible d’opérer à nouveau. Son avocat devra donc insister sur son incapacité de retravailler comme préjudice majeur. Au même taux de séquelles, cependant, il aurait été impossible – et peu stratégique – de viser ce poste de préjudice pour une victime professeure des écoles ou traducteur.  

La nomenclature n’est en réalité qu’une grille de lecture de votre corps et votre vie actuelle, pour les experts de l’indemnisation du préjudice corporel. Pour savoir ce qu’elle pourrait dire de votre cas, n’hésitez pas à contacter un avocat spécialisé.

Barèmes et nomenclatures en ligne : le risque pour une victime

Dans son parcours d’indemnisation après un accident ou agression, la victime croise différents professionnels. Les interlocuteurs de l’assurance (accident de la route par exemple), le médecin expert mandaté par l’assureur, un avocat, un médecin-conseil, de nouveaux experts et des magistrats en allant en cour d’appel…

Or, tous ces professionnels du droit du dommage corporel ne parlent pas toujours le même langage. Selon la juridiction et la cour d’appel, selon le milieu professionnel, on ne prend pas le dossier dans le même sens ni avec la même loupe.

C’est pourquoi il existe des grilles de lecture. Des barèmes médicaux, la jurisprudence de chaque cour d’appel, le référentiel Mornet ou la Nomenclature Dintilhac, qui contribuent à harmoniser la prise de décision.

Les mêmes outils pour tous

En effet, il peut arriver qu’une victime d’accident de moto à Tours obtienne une indemnisation quatre fois plus basse qu’une victime d’accident similaire à Paris. Il y a de nombreuses raisons à cela (comme le détaille cet article sur le référentiel Mornet).

L’une d’entre elles est le caractère individuel et singulier de chaque cas. C’est une fois encore l’exemple du chirurgien qui ne peut plus opérer. La même séquelle n’aura pas les mêmes conséquences sur la vie d’un professeur des écoles. On ne peut pas lier automatiquement une atteinte physique à une somme d’argent. On n’indemnise pas de la même façon un poste de préjudice similaire.

En somme, toutes les victimes de dommages corporels sont examinées à la loupe de la Nomenclature Dintilhac. Un outil qui sert à tous les dossiers, dans toute la France. Mais inutile, pour une victime, d’essayer de s’en servir seule ! Cet outil doit servir à votre avocat et aux experts médicaux. C’est votre avocat qui sait, mieux que personne, quels postes de préjudice sont essentiels dans votre cas. N’hésitez pas à demander conseil.

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Maître Hadrien MULLER

Avocat en préjudice corporel - Diplômé en évaluation des traumatisés crâniens
Maître Hadrien Muller est avocat au barreau de Paris. 
Il intervient pour la défense des victimes d’accident corporel en région parisienne et dans toute la France.

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