Hadrien Muller, avocat préjudice

Avocat spécialisé en préjudice corporel

Diplômé en évaluation des traumatismes crâniens

Déficit fonctionnel permanent : quel barème ?

Table des matières

Déficit fonctionnel permanent, barème ou pas barème ?

Du poste de préjudice dit « DFP », ou déficit fonctionnel permanent, dépendent quasiment tous les autres. L’indemnisation du préjudice corporel (causé par un accident de la route, accident du travail ou accident de la vie), repose pour l’essentiel sur le DFP. Autant dire que les déficits qu’il recouvre ne s’évaluent pas à la légère.

Du médecin expert au payeur, on va évaluer le taux d’incapacité de la victime, puis, en fonction de ce taux, s’appuyer sur des barèmes pour chiffrer le montant des indemnités qui y correspond.

Oui, il existe des barèmes précis et arrêtés. Mais ne vous laissez pas hypnotiser par ces grilles de chiffres. Pour vous, ils ne veulent pas dire grand-chose.

Point lexique. Déficit fonctionnel permanent : de quoi s’agit-il ?

Selon la Cour de Cassation (2009), la définition du DFP inclut « les atteintes aux fonctions physiologiques, la perte de la qualité de vie et les troubles ressentis par la victime dans ses conditions d’existence personnelles, familiales et sociales ».

Pour faire court, le DFP est un poste de préjudice corporel qui figure parmi les plus importants de la Nomenclature Dintilhac. Il correspond aux séquelles causées par un accident corporel et qui invalident tout ou partie de la vie de la victime. Il doit être constaté médicalement, par un expert.

On parle de préjudice extrapatrimonial, qui regroupe les séquelles physiques, psychologiques et morales de la victime. Et chacune des séquelles reconnues au titre de ce préjudice peut avoir un impact sur d’autres postes de préjudices… Notamment des préjudices patrimoniaux (dépenses de santé, frais médicaux, perte de gains professionnels, perte de chance professionnelle, incidence professionnelle, etc.).

Le DFP englobe bien plus que le constat des séquelles physiques. On y note aussi les conséquences morales de l’accident mais encore les conséquences morales pour la victime de se voir diminuée dans sa vie future, les impacts affectifs des annonces de diagnostics, etc.

Comment évalue-t-on le DFP ?

Le DFP recouvre aujourd’hui ce qu’on appelle l’AIPP (atteinte à l’intégrité physique et psychique de la victime). Il faut donc évaluer plusieurs aspects des préjudices sur la victime.

Cela se fait lors d’un examen médical, une fois que la victime a atteint un état de santé stable : la consolidation.

Le médecin-expert se réfère au barème officiel du concours médical pour noter le taux d’incapacité. Autrement dit, il « scanne » le corps de la victime pour en repérer la moindre séquelle et noter sa gravité selon ce barème. Ce médecin spécialisé en réparation juridique du préjudice corporel, doit parfois faire appel à un sapiteur (voire plusieurs) pour entrer dans le détail de l’examen (ophtalmologie, cardiologie, ORL, neurologie, psychiatrie, etc.).

Mais ce n’est pas tout.

La victime doit aussi pouvoir exprimer ses souffrances morales, ses plaintes et ses doutes, pour orienter la visite médicale et braquer les projecteurs sur la réalité de sa nouvelle condition.

Toutes les conclusions qui pourront en être tirées doivent entrer dans l’évaluation du DFP. Celui-ci ne se chiffre donc pas au hasard d’un claquement de doigt.

À quoi correspondent les « barèmes » du DFP ?

Étant donnée la subjectivité et la complexité de l’évaluation du déficit fonctionnel permanent (DFP), les experts disposent aujourd’hui de grilles de lecture et de barèmes pour s’aider. Comme indiqué plus haut, le principal outil est le barème du concours médical.

Si vous êtes victime vous-même (ou accompagnant), inutile toutefois de vous précipiter sur ces barèmes pour vous faire une idée à l’avance : ils sont purement indicatifs. Rien n’oblige donc les médecins (médecin-conseil, expert judiciaire, médecin arbitre) à appliquer l’un ou l’autre à la lettre.

Dans la procédure d’indemnisation, il faut séparer deux choses.

  • L’évaluation médicale du DFP, qui consiste à établir le taux d’incapacité de la victime. Ce taux est un pourcentage, défini en fonction du barème du concours médical.
  • L’indemnisation de ce pourcentage de déficit, selon la « valeur du point ». Ce point, ce sont des montants d’indemnités (indicatifs, eux aussi) que l’on devrait accorder à la victime selon le taux d’incapacité constaté et l’âge à la consolidation.

À ce stade, vous pourriez être tenté(e) de chercher à faire le calcul vous-même… Mais ce n’est pas si simple que ça en a l’air.

Un calcul facile pour le déficit fonctionnel permanent ?

L’erreur commune – et compréhensible – des victimes directes (ou victimes indirectes) qui souhaitent se renseigner sur l’indemnisation d’accident corporel, est de s’emparer des barèmes pour faire le calcul.

Cela peut donner des choses comme… La cécité d’un œil des suites d’un accident peut correspondre à un taux de 25% (dans la grille de barème du concours médical que vous avez trouvée sur internet). La victime a 19 ans, elle se trouve donc dans la case (surlignée dans le tableau plus bas) correspondant à 2160€. Soit un calcul de 25 x 2160 = 54 000€ d’indemnités au titre du préjudice du DFP.

Raisonnement intéressant, calcul erroné.

Ce à quoi servent réellement les barèmes

Ce calcul n’est pas juste, car il ne tient pas compte de la réalité des barèmes : ils ne sont qu’indicatifs.

Autrement dit, chacun des experts qui examinera la victime et chiffrera les dégâts constatés et leur « valeur » indemnisée peut s’appuyer sur son propre barème.

Or, de la compagnie d’assurance au juge (si le dossier d’indemnisation arrive au tribunal), chacun s’appuiera probablement sur ses propres choix indicatifs. C’est justement là que coincent la plupart des dossiers d’indemnisation des victimes…

Par ailleurs, les taux d’incapacité ne s’additionnent pas entre eux mais se combinent selon des calculs à établir par le médecin lui-même. De fait, il est impossible pour la victime d’évaluer elle-même l’étendue de son préjudice et encore moins de la chiffrer.

Et c’est pourquoi il est vivement conseillé à une victime de se faire accompagner d’un avocat spécialisé dans le dommage corporel pour s’y retrouver.

Un exemple de barème…

À titre indicatif, voici un extrait des barèmes prétendument donnés par les cours d’appel d’Agen, Angers Bordeaux, Grenoble, Limoges, Nîmes, Orléans, Pau, Poitier, Toulouse et Versailles, en 2011. Ce tableau fixe le prix (indicatif) du point d’incapacité permanente partielle de la victime (ou IPP, que remplace aujourd’hui le DFP).

Problème : ce tableau apparaît sur internet, dans des documents qui semblent officiels. Et il pourrait vous paraître utile. Mais il n’est absolument pas valable !

En réalité, le barème dit « Mornet » (du nom du magistrat qui l’a créé en faisant une moyenne des cours d’appel de France), donne des chiffres bien plus élevés. Par exemple, au lieu des 2170 qui apparaissent ici dans la case concernée, ce barème monte plutôt à 3 160.

Toutefois, ce barème Mornet est lui-même tout aussi indicatif que les autres…

Pour mieux comprendre cette question complexe, lisez ici la définition simple du déficit fonctionnel permanent.

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Maître Hadrien MULLER

Avocat en préjudice corporel - Diplômé en évaluation des traumatisés crâniens
Maître Hadrien Muller est avocat au barreau de Paris. 
Il intervient pour la défense des victimes d’accident corporel en région parisienne et dans toute la France.

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