Hadrien Muller, avocat préjudice

Avocat spécialisé en préjudice corporel

Diplômé en évaluation des traumatismes crâniens

Pretium doloris ? Mais pourquoi vous parle-t-on en latin ?

Table des matières

Pretium doloris ? Precium doloris ? Prétium doloris ? Pressium doloris ?

C’est quoi ce mot latin ? 

Normalement, vous n’auriez pas dû le rencontrer. Mais les habitudes des spécialistes de l’évaluation des dommages corporels sont telles que ça n’a pas loupé. Le Pretium Doloris finit toujours par apparaître dans un dossier d’indemnisation. Vous avez reçu un courrier utilisant ce vocabulaire étrange pour traiter de votre situation.

Ou alors c’est un de vos interlocuteurs (assureur, médecin-conseil) qui, au cours de la discussion, vous en a parlé ?

Cela semble compliqué. Cela sent l’entourloupe. C’est ce que vous vous dites ?

En fait, il y a plusieurs hypothèses possibles.

Vous n’auriez jamais dû rencontrer le mot de « pretium doloris »

Si ce recours au latin sent l’entourloupe, comme dans un film policier des années 60, c’est qu’en effet, vous n’auriez jamais dû rencontrer ce mot.

Mais bon, si vous lisez ces lignes, c’est qu’il s’est imposé quand même…

Alors commençons par expédier le côté « version latine » de l’histoire. Au cas où les cours d’initiation au latin au collège vous auraient, malgré tout, laissé quelques bons souvenirs, sachez que le véritable terme s’écrit « pretium doloris » . Cela signifie : « prix de la douleur »  

A priori, le concept de « doloris »  est plutôt une notion qui vous est favorable. C’est un mot qui s’est installé dans le droit lorsqu’on a cherché à chiffrer le véritable montant d’un préjudice. Sans rien oublier.

Bien sûr (s’est-on dit alors), il faut tenir compte dans le calcul final de l’indemnisation – notamment dans le cas de dommages corporels – de ce que l’accident a directement coûté à la victime :

pretium doloris définition - quand on ne peut plus travaillerElle n’a pas pu travailler pendant X semaines ? Cela correspond à un chiffre précis de perte de revenus ;

pretium doloris définition - dommages corporels et chirurgie esthétiqueElle a dû payer une intervention de chirurgie esthétique et réparatrice ? Cela correspond à un autre chiffre qui vient s’ajouter au précédent ;

pretium doloris définition - assistance tierce personneElle a dû faire appel à une assistance extérieure, pour tel ou tel acte de la vie quotidienne ? C’est un troisième chiffre.

Mais il ne suffit pas d’additionner ces coûts directs pour couvrir la totalité du préjudice.

On doit y ajouter d’autres types de préjudice dont ce fameux « prix de la douleur ».  

Il s’agit en fait de compenser financièrement les souffrances ressenties par la victime à la suite de l’accident (ou de l’événement) qui a causé ses dommages corporels. Elle a souffert (elle souffre encore peut-être), physiquement et moralement (ses blessures, son hospitalisation, etc.). Cela fait partie de son préjudice, cela aussi doit être compensé financièrement, c’est le « pretium doloris ».

En finir avec le latin : pretium doloris se dit maintenant « souffrances endurées »

La notion vous est donc favorable. Mais si j’écris que vous n’auriez jamais dû en entendre parler en latin, c’est que l’expression pretium doloris a été progressivement remplacée par le terme souffrances endurées. Ce changement est arrivé à la suite de la loi du 27 décembre 1973.

Cette loi réglementait la méthode par laquelle la Sécurité Sociale pouvait se rembourser des frais médicaux qu’elle avait avancés pour une victime (en lien avec le concept de pretium doloris), sur les indemnités que la victime recevait par la suite de la part des assurances.

La loi disait en substance : « la Sécurité Sociale peut prendre ce qu’il faut pour se rembourser, mais attention : elle ne peut pas tout prendre. Il doit rester au fond de la cagnotte une somme qui vient compenser les souffrances endurées. Cette somme-là revient à la victime et à elle seule. »

Ce terme de « souffrances endurées » est devenu désormais le terme consacré. On l’emploie notamment depuis la mise en œuvre de la fameuse « Nomenclature Dintilhac » en 2005 (voir notamment sur cette nomenclature Dintilhac, cet article).

La nomenclature Dintilhac donne même une définition

Ce dernier texte donne en effet une définition précise des « souffrances endurées » : « Il s’agit de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c’est-à-dire du jour de l’accident à celui de sa consolidation. En effet, à compter de la consolidation, les souffrances endurées vont relever du déficit fonctionnel permanent et seront donc indemnisées à ce titre ».

Comme vous le voyez, il s’agit d’un préjudice temporaire. C’est-à-dire qu’il ne concerne que les souffrances éprouvées par la victime avant la consolidation de son état de santé (voir sur ce terme, notamment, cet article sur la notion de consolidation).

On peut noter aussi que, depuis l’adoption de cette définition en 2005, les souffrances psychiques et morales sont reconnues comme faisant partie intégrante des « souffrances endurées ». Et qu’elles méritent donc une compensation adéquate. Il est crucial qu’on en tienne compte, surtout face à une personne qui vous parle en latin.

Si cette personne ne sait pas qu’on ne parle plus latin… Ignorerait-elle aussi qu’il faut maintenant indemniser les souffrances psychiques et morales ?

Comment chiffre-t-on les « souffrances endurées » ?

Une question primordiale se pose immédiatement. Comment calcule-t-on les compensations des souffrances endurées ? Sur quelle base met-on des chiffres ?

Sachez d’abord qu’il n’existe pas de grille officielle pour l’indemnisation. Néanmoins, les experts se sont accordés sur une méthode pour objectiver ces souffrances, en s’appuyant sur une échelle de 0 à 7 pour l’indemnisation. Cette échelle sert de référence pour déterminer le montant de l’indemnisation.

Cette échelle ressemble à peu près à ceci :

Quels sont les montants types de l’indemnisation des souffrances endurées ?

Justement, il n’y a pas de montant « types ». Il n’existe pas de barème officiel pour l’indemnisation (ce qui vaut pour tous les postes de préjudices).

Les montants d’indemnisation pour ces souffrances endurées peuvent varier considérablement. Ils peuvent aller de quelques centaines d’euros (environ 0.5/7) à près de 100 000€ (7/7), selon les décisions des tribunaux.

Et il n’est pas toujours facile de faire entrer tous les critères d’évaluation des souffrances (l’âge, les facteurs personnels, …) dans cette échelle numérotée.

Le mieux est de se faire aider par un professionnel de l’indemnisation qui va s’appuyer sur cette échelle pour mieux négocier pour vous. 

Souffrances endurées l'échelle des 7 niveaux

Quels sont les montants types de l’indemnisation des souffrances endurées ?

Justement, il n’y a pas de montant « types ». Il n’existe pas de barème officiel pour l’indemnisation (ce qui vaut pour tous les postes de préjudices).

Les montants d’indemnisation pour ces souffrances endurées peuvent varier considérablement. Ils peuvent aller de quelques centaines d’euros (environ 0.5/7) à près de 100 000€ (7/7), selon les décisions des tribunaux.

Et il n’est pas toujours facile de faire entrer tous les critères d’évaluation des souffrances (l’âge, les facteurs personnels, …) dans cette échelle numérotée. 

Le mieux est de se faire aider par un professionnel de l’indemnisation qui va s’appuyer sur cette échelle pour mieux négocier pour vous. 

Conclusion : que devez-vous faire avec ce terme de « pretium doloris » ? 

Il faut le reconnaître, les habitudes sont tenaces. Dans l’univers du droit, surtout, l’usage fréquent du latin persiste. D’où la présence de cette expression datée. On l’emploie encore trop souvent pour que les victimes elles-mêmes finissent par aller chercher sa signification sur Google. Ce qui fait que le « pretium doloris » ne disparaît jamais vraiment.

Or – c’est important – si quelqu’un se met à vous parler latin, sur votre longue route vers l’indemnisation, demandez-vous toute de suite dans quel cas de figure vous êtes :

A) La personne utilise « pretium doloris » pour vous impressionner ? Elle veut sans doute vous placer dans une position de négociation défavorable.

B) La personne a une grande expetise dans son domaine, au point d’avoir encore en tête tous les anciens principes juridiques (même ceux des textes d’avant 2005 et 1973) ? Elle a peut-être laissé échapper un « pretium doloris », mais vous pouvez sans doute lui faire confiance.

C) En fait, elle n’y connaît rien ! La personne ne maîtrise pas plus le pretium doloris que vous.

Si « pretium doloris » vous a amené à lire cet article parce qu’il a été prononcé ou écrit par un expert mandaté par votre assurance… Faites attention ! Il aurait tout intérêt à minimiser le montant de l’indemnisation. Vous pourriez donc être dans le cas A).

Peut-être utilise-t-il le pretium doloris pour vous faire croire que ces sommes sont figées dans de vieux bouquins depuis des lustres. Que c’est comme ça et c’est tout.  

Bref. Sauf dans le cas rarissime où vous avez répondu B), c’est sans doute le moment de faire appel à un avocat qui saura répondre en latin à la partie adverse et vous parlera à vous … en français !

Voir ici la place du Pretium Doloris dans votre dossier d’indemnisation.

Image de Maître Hadrien MULLER

Maître Hadrien MULLER

Avocat en préjudice corporel - Diplômé en évaluation des traumatisés crâniens
Maître Hadrien Muller est avocat au barreau de Paris. 
Il intervient pour la défense des victimes d’accident corporel en région parisienne et dans toute la France.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *