Vous êtes victime d’un accident de la route (ou votre proche), vous avez naturellement besoin d’être rassuré(e). Notamment sur l’indemnisation à laquelle vous pouvez prétendre. C’est bien normal. Alors vous allez rechercher « barème indemnisation accident de la route » sur Internet. Vous vous renseignerez également sur les délais d’indemnisation après consolidation après préjudice du dossier.
Pour vous tranquilliser, vous allez chercher à obtenir un chiffre, un barème, une estimation. Ces données qui vous donnent la sensation que vous maîtrisez mieux votre situation, que vous savez sur quel pied danser.
Le problème, c’est qu’en cherchant à chiffrer vous-même combien vaut votre préjudice corporel, vous vous préparez plus de stress à l’avenir.
L’angoisse de ne pas savoir : rien de plus naturel
La psychologie humaine est naturellement faite pour rejeter l’incertitude. Ce qu’on ne maîtrise pas est un potentiel danger, une menace. Par un instinct qui pourrait remonter au lointain passé où l’homme était une proie comme une autre, il ne supporte pas de ne pas savoir. Savoir, c’est pouvoir aiguiser sa vigilance, réduire l’imprévu et se préparer à la suite, à agir.
C’est donc tout naturel de chercher à éliminer les zones d’ombres.
Or, après avoir vécu le traumatisme d’un accident de la route (conducteur ou passager), et alors que vous en subissez encore les conséquences, vous avez doublement besoin d’éliminer les sources de stress. Le changement que l’accident a imposé à votre vie courante est déjà, en soi, source d’inquiétudes. Là aussi, c’est purement humain, le changement génère toujours un stress.
Aussi, la possibilité de prévoir l’étape suivante, et de vous projeter dans l’avenir grâce à un barème semble évidemment salvatrice.
Pourquoi le barème rassure
Il donne d’abord la sensation que votre cas rentre dans des cases. Et ça, c’est déjà rassurant en soi. Si quelqu’un peut décrire votre situation, c’est qu’elle est reconnue, et c’est déjà un pas vers le soulagement. On admet votre souffrance.
Par ailleurs, l’impression de vous retrouver dans la description du barème vous pousse à penser qu’il y a une solution à la clé. S’il existe des chiffres aussi précis qui correspondent à ce que vous pensez vivre, c’est que votre situation peut se résoudre. On peut vous indemniser.
Enfin, vous allez chercher à obtenir un chiffre, une donnée précise sur laquelle vous pouvez commencer à vous construire un futur. Si le montant de l’indemnisation que vous vous calculez vous paraît juste, vous allez pouvoir souffler et préparer vos calculs. Frais médicaux et dépenses de santé, pécule pour compenser la perte de revenus temporaire, les frais divers, etc. : vous pouvez déjà imaginer comment vous répartirez les sommes pour vous reconstruire.
Sauf que, dans les faits, vous avez tout faux.
Accidenté de la route : là où les barèmes vous mentent
Si vous êtes la victime d’un accident de la route ou d’un accident de la circulation, votre indemnisation n’aura certainement rien à voir avec ce que vous offre le barème. (Ce qui suit vaut bien sûr si vous n’êtes pas responsable de l’accident).
Sur internet, vous rencontrez des barèmes qui s’appuient sur la fameuse Nomenclature Dintilhac. On vous liste les postes de préjudices auxquels on attribue ensuite un montant d’indemnités « à titre indicatif ». Préjudices corporels, préjudice moral, préjudices patrimoniaux et préjudices extra patrimoniaux, préjudice d’agrément, préjudice esthétique, déficit fonctionnel, pretium doloris… Chacun suivi d’une note et d’un montant. Comme si toutes vos séquelles étaient similaires à celles de tous les accidentés et avaient donc le même prix.
Eh bien, c’est faux. Pire, c’est avec ce genre de chiffres en tête que vous allez vous rassurer… Et passer totalement à côté de ce à quoi vous avez vraiment droit.
Ce à quoi vous avez réellement droit
- Les barèmes indicatifs
Dans une procédure d’indemnisation d’accident corporel, vous devez passer par une expertise personnalisée. Votre dossier médical est la base sur laquelle va s’appuyer la compagnie d’assurance.
Après consolidation de votre état de santé, vous êtes donc examiné par un médecin expert, qui liste les préjudices subis. Il s’appuie alors sur la fameuse nomenclature Dintilhac, qui liste tous les préjudices subis. Là, vous rencontrez les premiers barèmes, liés à certains types de préjudices (déficit fonctionnel permanent, préjudice esthétique, souffrances endurées…) qui s’évaluent sur une échelle. L’évaluation médico-légale peut par exemple noter que vos souffrances montent à 4/7.
Ensuite, le médecin transmet son rapport à l’assureur qui accole un chiffre à chaque case listée. Et c’est là que les choses peuvent varier à grande échelle. Les assureurs établissent leurs propres barèmes, différents des barèmes des tribunaux et des cours d’appels, qui eux-mêmes varient d’une région à l’autre.
Par ailleurs, ces barèmes n’ont aucune valeur légale. Autrement dit, ils sont indicatifs et ne contraignent personne. Aussi, pour des souffrances évaluées à 4/7 par le médecin expert, la victime peut se voir proposer de 8 000€ à 20 000€ : aucune loi n’établit de montant fixe.
- L’indemnisation du dommage : une affaire totalement personnelle
Ce que ne disent pas tous vos barèmes en ligne, c’est que ces chiffres « indicatifs » ne reflètent pas votre situation personnelle. Chaque cas est totalement différent de l’autre, même si vous pensez trouver des similitudes avec des témoignages en ligne.
Votre situation personnelle et familiale, votre situation professionnelle, votre âge, votre état de santé avant l’accident sont autant de facteurs qui changent la donne. Mais pas que ! Et c’est ce « pas que », qui fait toute la différence.
Imaginez un peu. Vous avez subi un grave traumatisme crânien. Des séquelles physiologiques qui ralentissent votre diction peuvent bouleverser toute votre carrière, pour peu que vous ayez des réunions à mener, une voix à poser, ou autre. Y aviez-vous pensé ? Là, on ne parle plus seulement de votre dommage corporel ni de vos gains professionnels qui pourraient baisser. Il s’agit pour vous d’une dévalorisation sur le marché du travail. Vous pourriez avoir des difficultés à l’avenir à retrouver un emploi dans votre secteur. Avoir à reprendre des études…
Ce genre de choses ne vous sautera pas aux yeux, vous risquez même de ne pas vouloir l’envisager (et c’est bien normal !). Il y a encore moins de chances que vous sachiez chiffrer ce type de conséquences, les dégâts psychologiques et les bouleversements qui pourraient advenir.
Aussi, et même en suivant à la ligne les indications des barèmes si rassurants, vous allez vous tromper. Au mieux, vous risquez d’envisager de recevoir une aide supérieure à celle qu’on vous proposera. Au pire, vous risquez d’imaginer que c’est un montant normal, et de vous conformer à des indemnités sous-évaluées.
La bonne recette pour vous rassurer, c’est de vous faire aider par un expert. C’est aussi votre seule garantie d’être indemnisé à la juste valeur de vos préjudices subis. Il vaut mieux prendre un avocat spécialisé dans le dommage corporel qui, lui, sait exactement à quels barèmes ne pas se fier. Et qui saura, avec un médecin conseil, s’assurer que vos préjudices sont bien chiffrés.